Emmanuel Carrère me bouleverse toujours. Chaque fois que je finis l'un de ses livres, je me dis: "Terminé! Il est décidément trop sombre." .
Et puis, "je retourne à l'abattoir" à chacun de ses titres.
L'auteur a côtoyé 2 familles endeuillées. Leur courage, leur lutte pour continuer à vivre sans les êtres aimés, lui ont donné une leçon de vie. Ou, tout au moins, lui ont permis de relativiser son mal être.
Il a écrit le récit de leurs douleurs. Parce qu'un écrivain a cette capacité de pouvoir offrir une histoire à ceux qui ne veulent jamais oublier, jamais "les" oublier.
Au lieu de dire "Lisez ce récit, il est magnifiquement beau !", je vais plutôt écrire "Ne lisez surtout pas ce récit, il est beaucoup trop fort !". Vous savez comme on crie à l'héroïne d'un film d'horreur "N'ouvre pas cette porte ! Tu ne pourras plus faire marche arrière et il en sera fait de toi !".
N'ouvrez surtout pas ce livre si vous n'aimez pas Emmanuel Carrère. C'est son "pur jus": noirceur, manipulation de vos terreurs, incrustation dans vos nuits. Et cette touche d'égocentricité déjà présente dans "Un roman russe" pourrait bien vous agacer (moi, je fonds de compassion!).
N'ouvrez surtout pas ce livre, tout simplement, si vous n'avez aucune envie d'avoir le coeur à l'envers ou l'âme cabossée.
Mais si vous êtes kamikaze, maso ou tellement admiratif du style Carrère, à vos risques et périls, ouvrez le !
Dans la seconde suivante, vous saurez que vous n'auriez pas dû, mais ce sera trop tard.
Vous allez être engloutis sous une tonne d'émotions. Engloutis, pas étouffés. Parce que derrière toute la douleur, l'injustice et l'incompréhension, s'épanchent l'amour, la joie, l'innocence de l'enfance, l'amitié et la bonté.
Les autres vies que les nôtres restent la vie. Malgré tout.
Cuné parle de dignité et de douceur à propos de ce récit.
En recherchant d'autres avis, j'ai découvert le blog de Flora: son billet dit combien elle fut touchée, elle aussi.
Par contre, Yves, lui, reconnaît de belles pages mais fut globalement déçu par sa lecture.
Editions P.O.L
Crédit couverture: Editions P.O.L et Fnac.fr