Avant même de commencer un roman de Pascale Kramer, je sais que je vais peiner: son style est complexe (pas ou peu de dialogues), ses textes contiennent des nuées de détails qui auront leur importance beaucoup plus loin, ses thèmes sont difficiles et ses atmosphères lourdes et angoissantes. Pourtant j'ai ouvert pour la 4ème fois un de ses livres... Il faudrait, peut-être, que je me pose sérieusement la question "Suis-je masochiste?"!
Un couple de français retraités, profite de leur maison en Californie. Un déluge provoque un glissement de terrain et la villa est souillée de boue, menacée par un rocher stoppé miraculeusement par les arbres du jardin, mais encore en équilibre instable. Leur fille Valérie, leur fils Cyril avec sa femme et ses enfants arrivent pour les aider à déblayer toute cette fange. Mais peut-être cette famille est-elle autant nauséabonde que la propriété...
Le roman raconte une seule journée. Il ne faut pas plus à Valérie pour prendre conscience qu'elle a toujours abordé sa vie en "sourde et aveugle". Enfant elle n'a jamais voulu mémoriser tous ces détails qui lui auraient indiqué la vérité sur ses parents. Au fils des heures, au gré des révélations de son frère, elle ne pourra plus les ignorer. Alors l'ambiance du livre s'appesantie, l'angoisse s'accentue.
J'aurais aimé lire très vite pour me débarrasser de cette tension, mais avec Pascale Kramer c'est impossible! Son style est suffisamment difficile pour m'astreindre à un déchiffrage laborieux. Ma lecture s'est étirée, est devenue longue, interminable comme les heures de cette journée. Ainsi "temporellement" mise en totale symbiose avec les personnages, leurs angoisses, leurs colères sont devenues miennes.
La fin de l'histoire pour moi ou la fin de la journée pour les personnages aurait pu nous apporter l'apaisement... seulement l'auteure a dû juger qu'une fin ouverte lui permettrait de garder son emprise sur nous tous. Quelle sadique! Oui, et moi je suis bien maso puisque j'en redemande: "Retour d'Uruguay" et "L'adieu au nord", ses 2 romans que je n'ai pas encore lus, sont dans ma LAL.
( Mercure de France)
Crédit photo couverture: Editions Mercure de France et Fnac.fr