Ceux qui naviguent sur les blogs savent déjà, via mes com', que j'ai lu le dernier roman de Jean-Philippe Blondel, que j'ai ressenti les mêmes sensations que Caro[line], et que j'ai perçu l'intrigue complètement différemment de Laure...
Susan, une jeune anglaise, part avec ses 2 filles une semaine chez "papa-maman". Se faire cajoler à son tour; laisser les grands-parents s'occuper des enfants pour lire, aller au ciné. Elle suggère à Vincent, son français de mari, d'en faire autant. Il ferait tellement plaisir à sa mère! Et puis il pourrait revoir ses copains, savoir ce qu'ils sont devenus en 10 ans! Pas franchement emballé, Vincent convient pourtant qu'il pourrait bien laisser son boulot quelques jours... et prend l'Eurostar.
Je vais faire là un compliment hautement littéraire: en fermant, ce roman je suis restée comme "2 ronds de frites"!
C'est une expression chez nous qui veut dire à peu près "Rester bouche bée" ou "Etre scotchée" ou "Ah bah, ça alors!". Pendant quelques minutes, je n'ai pu ni parler, ni bouger... submergée d'émotions.
Pas simplement parce l'histoire est chargée de sentiments. Elle installe une angoisse sourde, elle inonde l'âme de questions dérangeantes: "Où fini l'égoïsme et où commence l'individualisme?". "Quand on part peut-on vraiment tout laisser derrière soi... laisser des amis sur le chemin... est-ce condamnable quand il est question de survie?". "Quelle part de responsabilité avons-nous sur les mauvaises décisions d'autrui?".
La misère de la solitude, le poids des préjugés familiaux, les choix pour son avenir, les amitiés qui s'étiolent, les obligations qu'on s'impose pour se donner bonne conscience... ce livre est tellement actuel dans ses nombreux sujets qu'il m'a été impossible de rester hermétique. Impossible de ne pas sentir "vibrer quelques cordes sensibles". Expression, cette fois, universelle mais tellement adaptée...
A ceux qui, après "1979" ou "Accès direct à la plage", disent qu'ils n'aiment pas le "style Blondel", je leur réponds qu'il n'existe plus de "style Blondel" et ce, déjà, depuis "Le passage du Gué". Il y a un auteur qui sait écrire les émotions belles ou moches, manier cynisme et humour. Il y a un homme qui sait chambouler. Il y a un Jean-Philippe qui sait toucher. Et pour cet extrait, il y a un Monsieur que je remercie.
"...Les proportions parfaites ne m'attirent pas outre mesure. j'aime qu'une femme ait son histoire ancrée dans le corps et qu'en la déshabillant se dévoilent les sièges de ses douleurs et de ses passions. Des cicatrices d'accouchements. Des signes d'inquiétude. Un reste de varicelle. Un renflement révélant la tentation du chocolat face à la déprime passagère..."
Parce que, ça fait du bien de lire ces mots-là ;-)
(Robert Laffont)
Crédit couverture: Edition Robert Laffont et Fnac.fr
PS: Dans ses meilleures années, mon Chéri doit lire... allez, disons, 3 livres. Trop curieux de savoir "qu'est-ce qu'elle lui trouve à celui-là, hein?" il a profité des 2 malheureux après-midi de soleil que nous avons eu cet été pour découvrir ce roman. Il ne pouvait plus en lever les yeux! Une honte! A côté, sur ma serviette, j'existais même plus!
Tout ça pour dire, que cette histoire d'homme peut plaire aussi aux hommes... donc au vôtre... donc vous pouvez lui offrir... donc vous pourrez lui emprunter ;-)
Laurence et Clarabel nous disent ce qu'elles en ont pensé ici et là