Insatiable lectrice
"Toujours un livre ouvert à lire, toujours un livre refermé à partager"
J'ai beaucoup aimé "Le malheur d'aimer". C'est le premier ouvrage de Claude Roy que je lis, et je suis conquise par son écriture à la fois simple et poétique, sa façon insidieuse de donner matière à réflexion. Avec ce roman, j'ai cru tout d'abord lire une belle histoire d'amour, mais j'ai été poussée, en catimini, à méditer sur le sentiment amoureux.
Je note ici un passage qui est le reflet exact de ce que je ressens quand j'aime. Et je suis toujours émue quand un auteur retranscrit des émotions qui sont aussi les miennes.
"Il est des êtres auprès desquels on se dit qu'on ne se sent pas soi-même. L'amour, c'est exactement le contraire, radieux, de ce sentiment obscur qui nous donne l'angoisse de ne pas nous habiter entièrement, d'être un autre que celui que nous sommes. Auprès d'Anna, grâce à Anna, il se sentait enfin lui-même. Qu'un être nous soit donné, c'est doublement une coïncidence, celle qui autorisa sa rencontre dans la foule des vivants, et celle qui nous permet enfin l'illusion précaire de coïncider avec nous-même."
En ce moment, je lis "En sortant de l'école" un recueil de nouvelles de Michèle Gazier. Toutes ont le même fil conducteur: une "prof" de lettres et ses désillusions universitaires. A priori, un thème qui ne m'accroche pas vraiment, mais "Le merle bleu", "Le cercle de famille" et "Le fil de soie" m'avaient suscités tant d'émotions que je me suis laissée tenter. Sans être réellement emballée, je prends plaisir à la lecture de ces récits. Ce matin, j'ai noté une phrase pour la réflexion qu'elle m'a inspirée. "Elle avait tant de mots dans sa tête qu'elle n'entendait plus le silence des désespoirs qui hurlaient devant elle." Moi aussi, plongée dans un livre "j'ai tant de mots dans la tête"que je m'isole. J'ai du mal à "relever mon nez", sortir de mon univers imaginaire et écouter ceux que j'aime. Pardon à vous! Etre une "insatiable lectrice" est, comme tout excès, préjudiciable par moment. Je vais essayer de m'assagir...heu...un peu...
je les ai savourés un peu plus que tous les autres.
Avec de nombreux patients, Ernest faisait intervenir le concept de regret dans la thérapie. Il leur demandait d'analyser les regrets que suscitait leur comportement passé, et les exhortait à ne pas entretenir de nouveaux regrets dans l'avenir. "Le but, disait-il, est de vivre de telle sorte que dans cinq ans vous ne vous retourniez pas en regrettant amérement les cinq dernières années qui se seront écoulées."
Irvin D. Yalom
"Mensonges sur le divan"